Le Financial Times a publié mardi, une longue enquête sur le Rwanda dans laquelle le journal économique et financier britannique accuse, preuves à l’appui, les autorités de Kigali d’avoir modifié les statistiques sur la pauvreté en 2015.
L’«analyse des 14.000 données du rapport ainsi que des entretiens avec des universitaires montrent que la hausse des prix pour les familles rwandaises a, dans l’hypothèse la plus probable, entraîné une hausse de la pauvreté entre 2010 et 2014», précise Le Financial Times, assurant qu’il y a eu «des tentatives récurrentes depuis 2015 pour fausser les résultats» des statistiques sur la pauvreté.
Le Rwanda rejette les accusations du journal, de même que La Banque mondiale du moins officiellement. Car le Financial Times publie ce mardi en exclusivité une lettre interne rédigée en 2015 par cinq employés et adressée à la direction de la Banque.
«De récents développements montrent qu’il existe potentiellement de sérieux risques pour la réputation de la Banque si ses opérations concernant le Rwanda continuent sur la même trajectoire», prévient le journal britannique.
Les auteurs de la lettre s’inquiètent «de la manipulation des statistiques officielles et de l’impossibilité de transmettre en toute transparence des données fiables».
Cette enquête du journal réalisée grâce à des data journalistes, arrive à la même conclusion qu’une information diffusée par la chaîne française international France 24, le 2 novembre 2015.
A cette époque, des sources crédibles et un lanceur d’alerte avaient dit à France 24 que le Rwanda avait changé ses statistiques économiques pour masquer une hausse de la pauvreté.
Selon la chaîne Tv française, le gouvernement de Kigali aurait changé les modes de calcul, notamment celui concernant le seuil de pauvreté. «Les paniers de consommation des Rwandais les plus démunis ont été modifiés», confirmait une autre source auprès de la télévision française.
«Ils ont réduit massivement, de plus de 70 %, les quantités de trois ingrédients de base : la patate douce, la pomme de terre irlandaise et la banane», avait ajouté la même source, précisant que ces faits intervenaient peu avant le referendum sur la révision de la constitution, afin de permettre à Paul Kagame de rester en théorie au pouvoir jusqu’en 2034.
À l’époque, le pouvoir ne voulait surtout pas que les données officielles montrent une augmentation du nombre de pauvres. Car face aux accusations de dictature et d’autoritarisme, le président rwandais exhibait l’embellie économique pour étouffer les voix qui critiquait sa politique.