La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a lourdement condamné hier mardi la Russie pour de multiples violations des droits fondamentaux dans le dossier qui a abouti à la mort de Sergueï Magnitski, un avocat anti-corruption très réputé.
Dans son arrêt, la CEDH dénonce les mauvais traitements, les conditions d’incarcération inadaptées, le défaut de soins médicaux adéquats et l’excessive durée de détention.
Les juges strasbourgeois estiment que Sergueï Magnitski a subi des violences carcérales jusqu’à peu avant sa mort, reprochent aux autorités russes d’avoir mené une enquête incomplète sur les circonstances de son décès et qualifient de «superficielle» la décision en mars 2013 des autorités judiciaires russes de classer le dossier sans suite.
La CEDH exige également de la Russie qu’elle verse 34.000 euros de dédommagement à la mère et à l’épouse de Sergueï Magnitski pour préjudice moral, une somme supérieure à ce que la cour prononce habituellement dans ce type d’affaires.
Si l’arrêt de la CEDH est une victoire pour la famille et les partisans de Sergueï Magnitski, il ne devrait avoir que peu d’effets dans cette affaire. Selon le forum d’ONG russes de défense des droits de l’homme, la Russie n’a exécuté pleinement que 38% des arrêts de la Cour européenne prononcés à son encontre depuis 1996 qu’elle est membre du Conseil de l’Europe.
Emprisonné en 2008 à l’âge de 36 ans pour fraude fiscale après avoir dénoncé une vaste machination financière de 130 millions d’euros orchestrée, selon lui, par des responsables de la police et du fisc, Sergueï Magnitski a été régulièrement frappé pendant ses onze mois de détention préventive et, laissé sans soins dans sa cellule. Il est décédé le 16 novembre 2009 dans une prison de Moscou, officiellement «par négligence».
Cette affaire avait déclenché une tempête diplomatique entre Moscou et Washington. L’administration de Barack Obama avait adopté fin 2012 un texte prévoyant des sanctions (gel d’avoirs et interdiction de visa) contre les officiels russes considérés responsables du décès de Sergueï Magnitski, ce à quoi le président russe Vladimir Poutine avait répondu par une interdiction aux familles américaines d’adopter des enfants russes.