Les magistrats tunisiens ont entamé, lundi 6 juin, une grève d’une semaine, pour manifester leur mécontentement face à «l’ingérence permanente» du président Kaïs Saïed «dans le pouvoir judiciaire».
La goutte d’eau qui a fait déborder le vase a été l’annonce de la révocation de 57 juges, faite au début du mois par le chef de l’Etat, les accusant de «dissimulation d’affaires terroristes», «corruption», «harcèlement sexuel», «collusion» avec des partis politiques et «perturbation du fonctionnement de la justice». En plus de leur limogeage, les magistrats mis à la porte pourront faire l’objet de poursuites.
Les principaux syndicats professionnels des magistrats ont donc appelés leurs membres à la grève, pour une semaine renouvelable, pour protester contre ce licenciement. D’après le président de l’Association tunisienne des jeunes magistrats, Mourad Massoudi, le mot d’ordre serait «très suivi» dans tous les tribunaux du pays.
Les syndicats fustigent l’initiative de Kaïs Saïed de s’être octroyé le pouvoir de révoquer les juges «sans le moindre recours» possible, en violation du «droit le plus basique à se défendre, garanti dans la Constitution».
«C’est une crise sans précédent en Tunisie et cette crise ne peut pas continuer comme ça parce que les magistrats sont solidaires et ils ont dit non à ces décisions de révocation sans aucun recours, sans aucune garantie», a martelé lundi la vice-présidente de l’Association des magistrats tunisiens, Aïcha Belhassen.
Mais Kaïs Saïed a fait amender la loi qui régit le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), autorité de tutelle de la justice chargée de nommer les juges, et s’est donné le pouvoir de limoger les juges et de leur interdire de faire grève. D’après certaines sources, le chef de l’Etat aurait convoqué la ministre de la Justice pour suspendre les salaires des juges grévistes.