« Être mariée à un étranger n’est pas facile du tout, nous sommes persécutées. » Comme d’autres Sud-Africaines noires, Thelma Okoro a bien du mal à trouver sa place dans son propre pays, parce qu’elle a épousé un Nigérian. Les infirmières lui reprochent ses choix de vie au lieu d’examiner son enfant malade, on l’insulte quand elle s’habille à la nigériane… Les réactions « sont négatives où que vous alliez », se désole-t-elle
On a aussi refusé sa candidature à l’obtention d’une « maison RDP », ces petites habitations que le gouvernement construit pour les plus pauvres.
C’était en 2011, mais Thelma en est encore toute retournée. « Ils m’ont dit que je n’avais pas le droit à une maison RDP parce que je suis mariée à un étranger, et que si je voulais une maison, il fallait que je divorce d’abord », raconte-t-elle.
« Je ne sais pas où c’est écrit dans la Constitution que vous n’êtes plus Sud-Africain quand vous êtes marié à un étranger! », s’insurge-t-elle. Avec d’autres femmes exaspérées par ces vexations à répétition, elle a rejoint l’Union des femmes de Nigérians en Afrique du Sud (Unwisa), un groupe fondé il y a deux ans qui regroupe désormais une centaine d’adhérentes.
Elles ont organisé des pique-niques et des tournois de foot intercommunautaires, manifesté, remis des pétitions au gouvernement… Et elles sont persuadées que la vague de violences xénophobes qui a secoué l’Afrique du Sud début avril aurait pu être évitée si on les avait prises au sérieux.
« S’ils nous avaient écoutées, ils auraient vu qu’il y a un feu qui couvait, et ils auraient su réagir », estime Lindwela Uche, la présidente de l’association. « Nous savions qu’un jour cette chose (les attaques xénophobes) arriverait, ça n’a pas été une surprise » renchérit Thelma Okoro. Les agressions des étrangers – généralement africains – ne sont pas rares en Afrique du Sud, où des violences xénophobes ont fait 350 morts depuis 2008.