Le projet de loi d’amnistie générale adopté en Conseil des ministres le 28 février dernier au Sénégal et soumis au parlement, relative aux «faits se rapportant aux manifestations politiques» survenues entre mars 2021 et février 2024, continue de susciter de vives réactions aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays.
L’ONG Amnesty International a estimé ce lundi que ce projet de loi «est un affront aux familles des victimes de ces violences et une prime troublante à l’impunité» et son adoption «constituerait un manquement de l’État sénégalais à son obligation de justice, de vérité et de réparation qui lui incombe en vertu du droit international pour les familles de plus de 60 personnes tuées lors des manifestations».
«Ce projet de loi constitue un déni de justice pour les victimes, ainsi que pour leurs familles, qui attendent justice, vérité et réparations. En adoptant une telle loi, non seulement l’État sénégalais manquerait à ses obligations nationales et internationales, mais il favoriserait également l’impunité pour les crimes de sang», a déclaré Samira Daoud, directrice régionale d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre.
Quinze familles ont porté plainte devant les tribunaux et attendent toujours que justice leur soit rendue, rappelle l’organisation en soulignant que les lois d’amnistie concernant les violations graves des droits de l’homme au Sénégal, ont été dénoncées par divers organismes régionaux et internationaux de protection des droits humains.
Pour Samira Daoud, les autorités sénégalaises ne doivent pas utiliser cette loi comme une excuse pour ignorer les crimes qui ont été commis. Outre les 60 personnes tuées par balle par les forces de sécurité, des centaines de personnes ont été arrêtées et d’importants dégâts matériels ont été provoqués, soutient-elle.
Amnesty International demande que des enquêtes judiciaires rapides, approfondies et impartiales soient menées sur l’usage de la force par les forces de défense et de sécurité lors des manifestations, et que les personnes soupçonnées d’homicides illégaux soient traduites en justice dans le cadre de procès équitables devant des juridictions civiles ordinaires.
Par ailleurs, l’ONG invite le gouvernement sénégalais à respecter le droit des personnes à exercer leur droit à la liberté d’expression et de réunion pacifiques, dans le cadre de la campagne «Protégeons les manifs».