La liberté de la presse en Algérie, est confrontée à de nombreuses lignes rouges et le simple fait d’évoquer la corruption et la répression des manifestations peut valoir aux journalistes menaces et interpellations, déplore l’organisation Reporters sans frontières (RSF) dans la 20ème édition du Classement mondial de la liberté de la presse rendu public ce mardi 3 mai.
Dans son rapport annuel, RSF relève que le paysage médiatique dans ce pays maghrébin dirigé actuellement par un régime politico-militaire, “n’a jamais été aussi détérioré”, soulignant que «les médias indépendants sont sous pression, les journalistes sont régulièrement emprisonnés ou poursuivis, et plusieurs sites internet sont bloqués» dans le contexte d’un climat politique “très tendu”, notamment depuis l’élection du président Abdelmadjid Tebboune, en décembre 2019.
D’après le même rapport, les médias et journalistes algériens surtout indépendants subissent «de nombreuses pressions, dont la majorité sont exercées par la présidence de la République, les partis politiques, les services de sécurité et les autorités locales” et il est ainsi “très difficile” pour les reporters d’effectuer leur travail de manière libre et indépendante» surtout que “le pouvoir politique a une influence directe sur la nomination et le licenciement des responsables des médias et des autorités de régulation”.
RSF fait état également de menaces et d’intimidations auxquelles sont confrontés les journalistes en l’absence de tout mécanisme de protection, précisant que “la censure et l’autocensure sont largement répandues” dans le pays et que les reporters qui osent critiquer les autorités sont placés sur écoute, font l’objet d’une surveillance et risquent des détentions arbitraires.
Dans ce contexte marqué par un cadre législatif “de plus en plus contraignant”, une réforme du code pénal qui a été adoptée en 2020, criminalise de un à trois ans de prison la diffusion de “fausses nouvelles” et de “discours haineux” visant à porter atteinte “à l’ordre et à la sécurité nationale” ainsi qu’”à la sûreté de l’État et à l’unité nationale”, ajoute RSF, précisant que ces textes sont “régulièrement utilisés pour poursuivre et condamner les journalistes” en les assimilant souvent à des «terroristes».
Pour conclure, RSF fait constater que le secteur des médias privés souffre depuis 2019, ajoutant que plusieurs médias et chaînes de télévision privés ont dû fermer après avoir été privés de publicité et des subventions de l’État qui «ne sont octroyées qu’aux médias publics ou aux médias privés proches du régime”.